Parfois elle voulait disparaître. Pour ne pas ressentir cette douleur atroce qui se nichait dans son ventre.  Pour ne pas voir sa peau délicate virer au rouge écarlate. Delaeh encaissait les coups avec un moral digne d'un boxeur professionnel, mais tout son être voulait que cela cesse. Il veut se libérer de cette bête qui la maltraite, de ses mains enchanteresses qui déclenchaient le chaos quand la colère montait et fulminait tel un cheval au galop. Ses paupières se plissaient à la vue du futur coup, elle n'en pouvait plus. Son corps n'était plus qu'un débris, plus qu'une chose sous ses mains. Il fallait que cela cesse, il fallait réagir. Penser à l'inévitable pour sa survie. Ses lèvres s'ouvrirent, elle ne cria pas. «  Isaac, arrêtes, lâches moi. » Son ton trahissait sa peur, mais ses yeux étaient fixe voulant ajouter un semblant de crédibilité. Delaeh parvint à se dégager de l'étreinte mortelle de son compagnon pour se réfugier dans la cuisine. Elle se remémorait chaque claques, chaque coup de poing qui fondait sur son petit ventre plat. Il vint à elle, comme un guerrier en quête de victoire sur un champ de bataille. Elle voyait dans ses yeux qu'il avait atteint un stade, qu'il n'était plus du tout lui-même. Elle ne le calmerait plus cette fois-ci. Son corps ne serait plus que bouillie et elle ne serait plus une femme. Il se jeta sur elle comme un loup affamé et la jeune femme prit une nouvelle claque qui faillit l'assommer. Des larmes prirent naissance et roulèrent sur ces joues. L'humanité d'Isaac s'était muée en un monstre de chair et de sang qui la rouait de coups. «  ISAAC, arrêtes arrêtes ! » Elle tentait par tous les moyens de le soulever, mais ses jambes n'avaient plus la force. Ses bras amortissaient le choc, tandis que ses yeux étaient à la recherche d'un objet. Dans sa poche arrière, il y avait un stylo qu'elle avait mit quelques heures auparavant en remplissant quelques paperasses. Ni une, ni deux, elle parvint à le prendre et l'enfonça dans le cou d'Isaac dont le visage se figea, comme si un fantôme était venu lui rendre visite. Un léger filet de sang coulait sur sa peau. Delaeh le repoussa avec vigueur, rassemblant toutes les forces qui lui restaient. Elle n'aurait pas survécu à un énième coup, non, Isaac l'aurait tué. Elle s'était défendue, battue contre l'amour de sa vie qui était sa propre perte. Isaac la regardait ébahi par ce geste inéluctable. Isaac retira le stylo de son cou, chose qu'il n'aurait dû faire car la jeune femme avait visé la jugulaire. Elle s'était souvenue de ses cours d'anatomie quand elle suivait encore des cours à la fac. Tout cela n'était plus que cendres et cela grâce à lui. Ses yeux s'étaient adoucis, appelaient à l'aide, mais Delaeh ne bougeait plus en regardant la chute de ce monstre qu'elle avait tant aimé. Il tenta de ramper jusqu'à elle, tandis que les pieds de Delaeh reculaient. La jeune brune entendit quelqu'un frapper à la porte. « POLICE, ouvrez ! » Seulement Delaeh n'arrivait plus à effectuer le moindre mouvement, son petit corps était épuisé et en même temps rassuré. La porte s'enfonça avec violence, la tête de la jeune femme se tourna vers les policiers qui scrutaient Isaac. Delaeh tremblait, son visage était fané, ravagé par les larmes. Les policiers allèrent voir Isaac qui agonisait sur le sol froid de la cuisine. « Mademoiselle Gale, je vous arrête pour le meurtre de votre mari, Isaac Gale ». Delaeh fronça les sourcils, mais aucun son ne voulait jaillir de sa gorge endolorie. Il était mort, elle l'avait tué. Elle n'arrivait pas à croire qu'elle avait fait cela, elle qui ne ferait pas de mal même à une mouche. Son instinct de survie avait pris possession d'elle avant de la quitter subitement. Ses mains étaient jointes derrière son dos et elle sentait le fer flirter avec la matière de son t-shirt qui ne ressemblait plus à rien mais à un bout de tissu déchiré.